EDGAR MORIN : LA TETE BIEN FAITE

Les défis

Il y a inadéquation de plus en plus ample entre nos savoirs morcelés et des problèmes transversaux, polydisciplinaires, globaux. Les ensembles complexes, les intéractions entre parties et tout, les problèmes essentiels deviennent invisibles. Le défi de la globalité est en même temps un défi de complexité. Notre système d'enseignement obéit à ces développements. Il nous apprend à isoler les objets, à séparer les disciplines, à disjoindre les problèmes plutôt qu'à les relier et les intégrer. Dans ces conditions, les jeunes esprits ne contextualisent pas les savoirs, ne les intègrent pas dans leurs ensembles. L'accroissement ininterrompu des connaissances édifie une gigantesque tour de Babel. Il y a disjonction entre la culture des humanités et la culture scientifique. La culture humaniste nourrit l'intelligence généralee, stimule la réflexion sur le savoir et favorise l'intégration personnelle des connaissances. La culture scientifique sépare les champs de connaissance, suscite d'admirables découvertes et de géniales théories.

L'information est une matière première que la connaissance doit maîtriser et intégrer. La connaissance doit être en permanence revisitée par la pensée. La pensée est plus que jamais le capital le plus précieux pour l'individu et la société. Chacun n'est plus responsable que de sa tâche spécialisée. Il y a aussi un affaiblissement de la solidarité. Les savoir est accessible aux seuls spécialistes et anonyme. Le citoyen est dépossédé de tout point de vue englobant et pertinent. La continuation du processus techno-scientifique actuel conduit à une régression forte de la démocratie. Cela pose le problème de la nécessité d'une démocratie cognitive. Il est possible dès lors d'envisager une réforme de pensée, qui concerne notre aptitude à organiser la connaissance. Ce livre propose une réforme de la pensée qui peut réformer le système éducatif, qui réformera à son tour la pensée.